Quelques mots de Frédéric DARD, écrivain…
Francis Latreille est un peintre heureux qui apporte de la joie.
Il n’a pas inventé un nouveau style de peinture, mais il a fait mieux : il a créé une planète où le Petit Prince vivrait à son aise. Sur la planète Latreille, que j’ai surnommée « La planète Rose », il ne se passe que du bonheur, de la joliesse, de l’innocence et de la poésie.
Qu’on ne vienne surtout pas qualifier mon Francis de « peintre naïf ».
Ce qu’il fait, c’est justement le contraire de la naïveté. A l’opposé des Yougoslaves, grands spécialistes de la peinture en question, Latreille peint sobre. II s’exprime avec une remarquable économie de moyens, d’est là son tour de force.
Vous prenez une plage bleue, un ciel bleu. Vous placez quelques mouettes blanches dans le ciel, un minuscule couple noir sur la plage, et vous vous mettez à rêver, à partir loin, très loin, dans un infini tellement pur qu’il vous emplit les poumons d’oxygène.
Avant lui, il y a eu Peynet, et puis le grand Folon. Eux aussi disent tout en quelques taches de couleur ou en quelques traits. Eux aussi vous saisissent par le bout de l’âme et vous emmènent promener au pays improbable de la gentillesse et du surréalisme tendre. Pourtant, chez eux, il reste des inquiétudes, des tourments, des lambeaux de chagrin, des nuages mal essorés.
Sur la planète Rose de Francis Latreille, le temps est résolument au beau fixe, l’échelle de Richter n’est jamais dépliée et les rares parapluies y servent d’ombrelles ou de nacelles.
Sur la planète Rose, les villages sont lovés dans les branches ; les filets de tennis sont attachés aux arbres, les pavillons des bateaux ne flottent pas nécessairement dans le même sens que les voiles, les moutons emmènent paitre les bergers, les soleils sont très rouges, la lune bien ronde et tous les chemins ne conduisent pas à Rome mais au pays où vous désirez vous rendre.
Il est des œuvres d’art vénéneuses (ou que mon imagination vadrouilleuse répute telles) ; plusieurs fois, il m’est arrivé de décrocher de mes murs des toiles qui ne m’aimaient plus pour les exiler dans quelque grenier où elles continuent de purger mes arbitraires, mes fantasques condamnations.
Jamais mes Latreille ne subiront un tel outrage. Pas si fou ! Je suis trop bien avec eux !
Ces tableaux sont mon printemps d’hiver, mon soleil de pluie, mon sourire des jours de misère.
Garnissez-en vos murs et vous serez définitivement en vacances.
Et puis, je vais vous confier un secret qui, donc, doit absolument rester entre nous : ils portent bonheur !
Frédéric DARD